S’il vous plait, libérez-nous des chakras !

Je vous partage mon témoignage et ma vision des chakras, par cet article que je souhaite très court, éclairant et drôle.

Pour la première fois de ma vie je découvrais l’existence du mot « chakra » et le ou les concepts que désigne ce mot, dans le film « un indien dans la ville » de 1994 que je regardais avec un très grand plaisir lorsque j’étais enfant et notamment dans cette scène qui marquait ma mémoire de la comédienne Arielle Dombasle.

A ce moment là mon imagination faisait florès, y compris grâce au talent de cette comédienne et je me questionnais. Que sont les chakras me demandé-je dans mon fort intérieur ? A quoi cela peut-il bien correspondre ? Où se trouvent les chakras dans le corps humain ? Que sont-ils ? Cette autre scène dans ce film « un indien dans la ville » contribuait à ma réflexion. Il y est question dans cette autre scène de cercles et de carrés, aussi, je faisais une inconsciente association d’idées entre les cercles, les carrés et les chakras, pour imaginer avec mon âme d’enfant, que les chakras seraient en fait plus d’un millier de petits points brillants présents partout sur le corps humain comme la trame des étoiles de l’univers.

Plus tard on m’informait dans les médias et dans les ouvrages des linéaires commerciaux, qu’il n’existerait pas des milliers de chakras comme je le croyais, mais sept chakras et j’abandonnais ainsi mon idée propre, considérant que j’avais mal appréhendé ce concept, ma trame étoilée sur mon corps n’étant donc que le fait de mon imaginaire, lorsque les chakras devaient être une chose beaucoup plus précise que cela.

A l’âge adulte je découvrais une chose beaucoup plus complexe.

A chacun des 7 chakras serait associée une partie physique du corps humain et un corpus protéiforme de concepts psychoaffectifs. Ce qui mérite quelques explications. Je ne suis pas certain d’avoir tout compris car précisément les promoteurs de ce concept des 7 chakras psychologiquement actifs et inférants si je puis dire sur des parties dédiées du corps humain, dénient le caractère de fait protéiforme de ce concept (alors qu’ils n’ont parfois pas conscience de ce même caractère protéiforme de ce concept). Si vous n’avez rien compris, c’est normal, ne vous inquiétez pas, je vais donc illustrer ce paragraphe par quelques exemples ci-dessous.

Par exemple, pour le « clairvoyant* » Christophe Allain* du cabinet « acte et sens », le premier chakra situé selon lui au niveau de l’entrejambe est associé aux concepts et relations de la sexualité, de la maitrise de soi, de l’alimentation, de l’animalité et des lignées familiales, lorsque par exemple pour lui le sixième chakra situé selon lui au niveau du cerveau est associé à la cognition, à la connaissance, à la science, à la réalisation, à la projection de soi dans le monde et à la modélisation du monde. Ainsi, selon lui chaque chakra est comme je l’introduisais ci-dessus, un corpus, c’est-à-dire un réseau ou un groupe de concepts physiques, psycho-affectifs, psychologiques, sociaux et relationnels, associé à une partie du corps humain, alors que chaque chakra interagit avec les autres dans les limites rigides et prédéterminées arbitrairement par cet inventeur, de ces mêmes corpus.

Cela signifie que les chakras sont une grille de lecture subjective, relative à celui qui l’invente dans des buts divers et à celui qui y croit dans d’autres buts divers, mais qu’ils n’ont pas d’existence propre ou de réalité propre par eux-mêmes, contrairement par exemple à ce que sont les concepts réalisés qu’on nomme « objets physiques ».

L’utilité d’une telle grille de lecture arbitraire et subjective en dehors d’un usage purement ludique, créatif ou récréatif, reste à mon sens à démontrer et je considère, assumant ce « je », que cette grille de lecture que sont les 7 chakras est préjudiciable à quiconque, lorsque ceux qui usent de cette grille arbitraire, n’ont pas conscience qu’elle en est une ! Ou encore, lorsqu’ils emploient cette grille de lecture dans le but consciemment ou inconsciemment de manipuler l’autre, de le contrôler et de le surveiller.

A contrario, les plus brillants psychologues, « médecins de l’âme » ou « maîtres » qui usent de cette croyance que sont les chakras pour trouver un point d’appui à leurs réflexions et un langage commun entre les psychés des Hommes, pourraient, s’ils sont réellement ce que ces titres supposent, nous parler des 7 chakras sans utiliser leurs mots.

Par exemple, nous pourrions croire que la phrase « son centre émotionnel est en vrac, mais il surcompense avec un intellect très développé de telle sorte qu’il est cohérent » et la phrase « son plexus solaire du 3ème chakra au niveau de sa poitrine est en vrac, mais il surcompense avec un mental de 6ème chakra très développé au niveau de son cerveau, de telle sorte que ses chakras sont alignés de son entrejambe jusqu’au dessus de son cerveau » seraient les mêmes, alors qu’elles sont en fait très différentes voire antagonistes. La première phrase pourrait être le propos d’un psychologue clinicien (quoi que), aussi elle est physiquement exacte en cela qu’elle désigne les faits de la psyché humaine par des concepts qui eux-mêmes ne sont que de pures idées protéiformes (le « centre émotionnel » ou « l’intellect » par exemple), alors que la deuxième phrase dit la même chose mais en imposant par arbitraire de faire une association entre ces mêmes pures idées protéiformes et des parties physiques du corps humains, sans qu’aucune preuve ne soit apportée que cette association serait physiquement constatée autrement que sous la croyance de ceux qui y adhèrent.

De plus et c’est là peut-être une chose beaucoup plus difficile à comprendre ou à identifier, mais le concept des 7 chakras induit une impossibilité et une interdiction de penser les sujets de ces 7 chakras en dehors de ces derniers. Je m’explique avec un exemple :

Si l’entrejambe est liée à son animalité et à la filiation avec les ancêtres, que le cerveau est lié à l’invention dans la matière et à la raison et que le cœur est lié à l’amour de l’autre ainsi qu’aux affectes, sous ce jeu arbitraire des 7 chakras, alors, il est impossible par exemple de penser son animalité indépendamment de la filiation avec les ancêtres, l’amour de l’autre indépendamment des affectes de cet amour et l’invention dans la matière indépendamment de la raison.

Par dessus cela il est alors aussi impossible par exemple, de penser la relation de son animalité avec l’invention dans la matière, indépendamment de la filiation avec les ancêtres ou la relation de la raison avec l’affecte indépendamment de l’amour de l’autre ou encore, la relation de l’amour de l’autre avec son animalité indépendamment des affectes.

Ainsi, les 7 chakras sont un corpus verrouillé d’associations arbitraires « d’objets psychiques » si je puis dire, alors qu’en réalité chaque individu humain possède non seulement un nombre qui lui est propre de chakras, que ces derniers se situent où il le souhaite dans son corps et qu’au surplus les « objets psychiques » associés à chacun de ces chakras sont dissemblables pour chaque individu, pendant que certains individus ne possèdent donc aucuns chakras.

Il m’apparait ainsi à titre très personnel, que cette croyance en l’existence des 7 chakras, pour auto-réalisatrice ou auto-créatrice qu’elle puisse éventuellement être si nous demeurons agnostique face à ce concept, peut aussi devenir une camisole mentale, une prison invisible ou une gangue dans laquelle sombrent comme on sombre dans des sables mouvants, ceux qui imposent cette croyance aux autres ou encore ceux qui se voient imposer cette croyance par ces autres.

Aussi, je suis blessé d’avoir été amputé de mes rêves, de mon imaginaire et de ma liberté, depuis qu’on m’impose partout jusque dans les bibliothèques ou les librairies, de croire que les chakras ne seraient pas autre chose que ce qu’ils sont pour moi, à savoir une constellation de petites lumières brillantes comme les étoiles de l’univers partout sur mon corps humain, pendant que par le fait de ces croyances qu’on m’impose de partager, je n’ai même plus le temps ou la capacité de développer et d’approfondir cette idée que je fis, ce rêve qui est le mien.

Paradoxalement, je crois et c’est ma croyance avec ce « je » que je porte, qu’une géométrie sacrée et une géométrie sacrée du corps humain dans son environnement, sont des questions sous-jacentes à cette thèse de l’existence des chakras, lorsque malheureusement en m’imposant de croire à l’existence de ces 7 chakras, je n’ai plus la liberté, ni même peut-être la possibilité psychique de penser cette géométrie sacrée ou donc cette géométrie qui n’est que pour moi sacrée.

S’il vous plait, libérez nos rêves et nos idées de la grille mentale que constitue ainsi en partie les chakras.

*clairvoyant ; qu’un fait de clairvoyance soit réel ou non, qu’on y croit ou non, un fait de clairvoyance n’étant toujours ou presque toujours que relatif à l’observateur, c’est entre guillemets que je propose d’employer ce mot.

*Christophe Allain : mon propos à son endroit dans cet article n’est ni mélioratif, ni péjoratif, je le cite car il est parmi ceux qui revendiquent de croire en l’existence des 7 chakras, celui qui est peut-être parmi les plus intellectuellement honnête pour soutenir cette « croyance ».